La télémédecine, le nouvel enjeu santé !
En pleine expansion depuis la COVID 19, la téléconsultation est entrée dans les moeurs. Elle est de plus en plus sollicitée par les soignants et les soignés et le secteur s'est vu bouleversé par l'apparition de nouveaux acteurs proposant ce service. Aujourd'hui, pour encadrer de façon plus efficace et transparente cette pratique novatrice, qui conduit cependant à certaines dérives, de nouvelles règles ont été éditées. Petit tour d'horizon de ce début de remise en ordre.
La télémédecine s'impose
Multiplication des téléconsultations
La téléconsultation s'est installée dans le quotidien des médecins et elle n'est pas prête de s'en aller. Présente chez les généralistes, elle l'est aussi chez les généralistes. Figurez-vous que, d'après une étude réalisée par Medaviz, les spécialistes (toutes disciplines confondues) sont les plus nombreux à faire usage de la téléconsultation (55,7% contre 43% pour les généralistes, pourtant majoritaires il y a deux ans seulement). Les soignants sont de plus en plus connectés et les patients, quant à eux, sont toujours plus nombreux à se tourner vers la téléconsultation. La difficulté d'accès aux soins a bien sûr accentué le phénomène, même si ce n'est pas la seule explication.
Le monde complexe de la télémédecine
Plateformes, médecin traitant en vidéoconférence, cabines de téléconsultation, mutuelles... La télémédecine existe sous plusieurs visages, avec des modalités qui transforment parfois l'écosystème de soins. Il est évident que la pratique du médecin traitant, qui effectue ponctuellement des consultations en ligne par le biais de plateformes (comme Doctolib pour ne pas la citer), ne soulève pas les mêmes problématiques éthiques que l'usage d'une télécabine dans un supermarché.
Or, ces télécabines foisonnent dernièrement partout en France, et même dans des lieux aucunement "médicaux" ou en rapport avec la santé (parlons, par exemple, du projet évoqué récemment d'installer ces dispositifs dans les gares de la SNCF). Les sociétés spécialisées dans la télémédecine (disposant de médecins salariés), telles que Qare, Medadom ou Livi, qui s'adressent à des patients qui n'ont pas de médecin traitant se sont multipliées et renforcées.
Certes, elles répondent à un certain besoin (faire face à la pénurie des médecins et à la difficulté "de trouver" un soignant), mais elles soulèvent également des questionnements et des problématiques. Elles participent, en effet, à désintégrer le concept du parcours de soins coordonné, avec le médecin traitant comme pivot. Sur une plateforme dédiée ou dans une télécabine , le praticien en face est un parfait inconnu pour le soigné et le sera toujours. Il est peu question ici d'une relation de confiance. Et pour le suivi, allez voir ailleurs...
De plus, cette pratique d'une consultation médicale "instantanée", à la demande presque, parfois réalisée au fond d'un supermarché (comme les cabines de Monoprix), réduit la médecine à un objet de consommation comme un autre. Souvenez-vous de l'abonnement proposé par le groupe Ramsay en juin 2023 : 11,90 euros par mois pour des consultations médicales illimitées 24h/24. Qui dit mieux ?
On n'est sûr que ce côté "open bar" soit bon pour notre système de santé. Ces téléconsultations (qui sont prises en charge par la Sécu, ne l'oublions pas) peuvent amener à une déresponsabilisation du patient, lui qui devrait être, au contraire, acteur de sa santé. Il ne devrait pas perdre de vue que la santé a un coût (même si elle n'a pas de prix !). Pour éviter les dérives et les abus, les pouvoirs publics ont créé de nouvelles règles prévues dans la loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS).
La nouvelle réglementation sur la télémédecine en 2024
Un agrément dorénavant obligatoire
Premier changement important : la délivrance d'un agrément pour les plateformes de téléconsultation. Seules les entreprises qui respectent un cahier des charges précis comportant des exigences techniques (sécurité informatique entre autres) et éthiques (création d'un comité médical associant médecins salariés et représentant de patients, pour recentrer l'organisme sur la figure du médecin, ce qui était fortement conseillé) pourront continuer, en 2024, de facturer des soins à l'Assurance-maladie. Les détails sur cette nouvelle règle du jeu ont été rendus publics dans un décret publié le vendredi 1er mars, entré en vigueur le lendemain de sa publication. Ça n'a pas traîné...
Le décret précise que les sociétés de téléconsultation doivent demander le renouvellement de leur agrément (valable 2 ans pour la première année) auprès du ministère de la Santé, au maximum 4 mois avant la fin de son échéance.
Autre petit changement : les entreprises de téléconsultation privées peuvent désormais salarier directement des médecins et percevoir la rémunération issue de leurs téléconsultations. Jusque-là, les plateformes devaient passer par des centres de santé pour pouvoir salarier leurs médecins ou facturer l'Assurance-maladie. Côté fréquence, aucun changement. Le décret laisse inchangé l'obligation pour les médecins de consacrer un maximum de 20% de leur temps à la téléconsultation.
La nouvelle législation sur la télémédecine s'efforce d'aller au-delà de l'agrément obligatoire. De nouveaux garde-fous ont été mis en place pour réguler le boom de la téléconsultation afin d'assurer la qualité des soins.
Télémédecine , la nouvelle charte de bonnes pratiques
Plusieurs règles ont pointé leur nez, notamment sur l'arrêt maximal des arrêts de travail prescrits en téléconsultation, qui est désormais fixée à 3 jours, ou sur l'encadrement des tarifs. L'acte de téléconsultation doit respecter le tarif conventionné secteur 1 et aucun frais de service ne peut être ajouté (contrairement à ce qui se fait généralement, il faut le dire).
De plus, un cadre a été pensé pour l'implantation des télécabines. Le décret prévoit le respect des obligations publiées le 8 janvier dernier par la Haute autorité de santé (HAS) sur le sujet. Si les lieux de soins doivent être privilégiés (pharmacies, centres de santé, etc.), d'autres environnements sont acceptés à condition de répondre à certaines conditions, comme le fait de disposer d'une "zone d'attente" et d'un "espace isolé des autres activités". Un peu flou, mais l'idée y est (et les gares sont visées...).
En tant que mutuelle engagée pour la qualité des soins (rappelons qu'elle a été fondée par des soignants), LML ne peut que se réjouir de ces nouvelles règles très nécessaires selon nous. Certes, la télémédecine permet, en réduisant les délais et les distances, de contribuer à faciliter l'accès aux soins, mais elle peut aussi favoriser l'apparition d'une médecine au rabais, si elle n'est pas réglementée, et sur le long terme, d'une médecine à deux vitesses. La médecine n'est pas un bien marchand et il est important de le dire et de le redire.
Quel remboursement pour la téléconsultation ?
C'est simple. Le mode de remboursement est le même que celui appliqué pour une consultation physique. La téléconsultation est ainsi remboursée à hauteur de 70% par la Sécurité sociale (hors dépassements d'honoraires pratiqués par les médecins de secteur 2), les 30% restants étant généralement pris en charge par la mutuelle.
Certaines mutuelles proposent des téléconsultations en inclusion dans leurs contrats, mais LML ne défend pas ce système. Complémentaire engagée pour l'indépendance des soignants et des soignés, LML repose sur un principe qu'elle ne remettra jamais en question : le libre choix du praticien par le soigné (ce qui ne peut pas être le cas si la mutuelle offre son propre service de téléconsultation). Il est important, selon nous, que la mutuelle n'interfère pas au niveau de la relation soignant/patient, afin de garantir la qualité des soins. Et puis, si on ne veut pas que la téléconsultation soit réduite à un simple exercice d'orientation, il faut qu'elle soit effectuée par un médecin qui connaît son patient.
Nous suivons la même philosophie pour les consultations de prévention proposées à l'ensemble de nos adhérents (et financées entièrement par nos soins !). Nous n'imposons pas de professionnel de santé, car ces séances sont toujours réalisées par le médecin de nos affiliés. La médecine repose sur une relation de confiance entre un praticien et son patient, même si la télésanté, comme elle est aujourd'hui développée, veut nous faire croire du contraire...