Comprendre la démographie médicale (Partie 1)
L'évolution de la population médicale française sur la période 2007-2017
Ces temps-ci, nous entendons beaucoup parler de pénurie de médecins, de déserts médicaux et bien d’autres termes qui tournent tous autour du même sujet : l’évolution de la population médicale. LML a donc décidé de rendre les choses plus claires en, dans un premier temps, faisant un état des lieux de cette population médicale sur 10 ans pour ensuite parler des causes ainsi que des conséquences des données analysées.
Tout d’abord, le seul et unique point positif de cette analyse : la population de médecins augmente. Cependant, on remarque un ralentissement de cette augmentation. En effet, sur la période 2007-2013, le nombre de médecin a augmenté de 4.7% Sur la période 2013-2017, il n’y a eu que 2.9% de médecins en plus (cf. Tableau 1, à télécharger ci-dessous).
Cette augmentation continue, bien que ralentissant, est pourtant à prendre avec des pincettes. En effet, il faut prendre en compte 3 points :
- Tout d’abord, la population de médecins généralistes qui ne cesse de diminuer alors qu’ils sont pourtant le pivot de la santé française en jouant le rôle de premier recours et d’aiguillage lorsqu’ils redirigent les patients vers les spécialistes quand cela est nécessaire. On observe donc un déséquilibre croisant entre généralistes et spécialistes, ces derniers étant de plus en plus nombreux. (cf. Tableaux 2 et 3)
- Ensuite, le nombre de médecins par habitant. En effet, cela fait 10 ans que ce taux varie entre 3.4 et 3.5 médecins pour 1000 habitants. Cela fait donc 10 ans qu’il devrait exister une pénurie de médecin en France, surtout au niveau des généralistes (en 2017, il y a 1.3 médecins généralistes pour 1000 habitants). (cf. Tableau 4)
- Enfin, l’âge des médecins. C’est d’ailleurs l’une des données les plus alarmantes que nous ayons étudiées. Nous observons en effet un vieillissement galopant de la population médicale. Lorsque l’on regarde par tranche d’âge, on remarque qu’en 2007 les médecins en activité ayant 60 ans ou plus représentaient 13% de la population médicale. En 2017, ils représentent 35.5%. (cf. Tableau 5).
On remarque aussi une augmentation fulgurante du nombre de médecins retraités encore en activité. En 2007, ils n’étaient que 2551. En 2017, ils sont 17458. Ce qui fait une augmentation de 588% en 10 ans. Cette montée extraordinaire a de quoi inquiéter puisque dans 5 ans, on peut justement penser que la plupart des médecins ayant 60 ans ou plus seront à la retraite, retirant de ce fait 76.874 médecins du territoire. (cf. Tableau 6).
Si nous sommes en pénurie de médecins depuis 10 ans, le ralentissement du nombre de médecins formés ne peut qu’être alarmant pour les prochaines années. En effet, si le nombre de médecins n’augmente pas proportionnellement à l’augmentation de la population française, alors cette pénurie que nous connaissons va encore s’accentuer. Pour mieux visualiser la situation dans laquelle nous nous trouvons ainsi que la répartition des médecins sur le territoire, voici une carte représentant la démographie et son évolution : (cf. Tableau 7)
Au final, la situation n’est pas très reluisante. Nous peinons à maintenir le même nombre de médecins par habitant depuis 10 ans, ce qui ne va pas pouvoir durer longtemps. Les médecins sont sous pression depuis trop longtemps et on en arrive à des seuils critiques de malaise mental et/ou physique. En effet, 67% des médecins sont touchés par la dépression et 25% ont déjà eu des envies suicidaires. De plus, 35% des médecins en 2017 ont 60 ans ou plus et ne resteront pas ad vitam aeternam en poste. Ce qui va bientôt représenter une grosse perte d’effectif et un accroissement spectaculaire des déserts médicaux, surtout si les pouvoirs publics s’entêtent à augmenter constamment la charge administrative.
Source : les atlas de la démographie médicale publiés par le CNOM (Conseil National de l'Ordre des Médecins) https://www.conseil-national.medecin.fr/node/1476